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Photo du rédacteurVincent

Beckmann à Madrid. Rage et ivresse d'un artiste majeur du 20° siècle

Dernière mise à jour : 29 déc. 2023


Culte en Allemagne, à peine connu dans le reste du monde. Max Beckmann, expressionniste de génie - bien que refusant l'étiquette - était en vogue dans le Berlin des années 30, avant que Goebbels ne le jette dans la fosse de l'art dégénéré. Le Thyssen lui consacre une riche exposition monographique. Une découverte pour nous, une rareté et une aubaine pour les amateurs d'art moderne.

Beckmann. Figuras del exilio

Beckmann. Figures de l'exil

jusqu'au 27 janvier au Musée Thyssen-Bornemisza, Madrid

Peintre radical et violent, Max Beckmann (Leipzig, 1884-New York, 1950) raconte la tragédie de son siècle. Deux guerres mondiales, un exil qui le pousse à l'errance à travers l'Europe puis aux États-Unis. Cet artiste allemand majeur, admirateur confessé de Cézanne, Manet et Delacroix, et en secret de Picasso, Braque et Chagall, disait avoir été éduqué à Weimar, à Florence, à Paris et à Berlin. Fuyant les nazis, il ne reverra jamais l'Allemagne, qu'il représente pourtant parfaitement, à travers une œuvre aussi sensuelle et érotique que cruelle.


Max Beckmann, Le fils prodigue, 1949, huile sur toile, 100x120cm, Sprendel Museum, Hannovre

Le Thyssen nous montre l'essentiel de l'œuvre en deux parties. La première, allemande, est centrée sur le peintre. Son autobiographie, depuis les prémices de la Première Guerre mondiale à l'accession du parti nazi au pouvoir. Beckmann est alors un artiste reconnu, adulé, quand il est subitement expulsé de l'École de Francfort, à l'arrivée de Hitler aux commandes du Reich. Le musée nous emmène ensuite tout naturellement sur les routes de l'exil. Les pièces de cette seconde partie nous montrent des groupes de personnages caricaturés, aux contours soulignés par de vifs tracés noirs; des masques, comme des identités tourmentées qui déborderaient des cadres, jusqu'à disparaître dans la mégalopole moderne, New York, où Beckmann a fini par s'installer. Et la mer comme point final au parcours, avec Les argonautes, le triptyque qu'il a terminé le jour de sa mort, le 27 décembre 1950. Au sens literal comme au sens figuré, l'exil traverse la sélection de cette deuxième partie de l'exposition. C'est la propre expérience de Beckman qui est au centre de ce choix : la condition même de son existence, évidemment. Mais aussi le sort de l'humanité, de l'homme moderne.

Max Beckmann, Société parisienne, 1931, huile sur toile, 109x176cm, Solomon R. Guggenheim Museum, New York

Max Beckmann, Double portrait, 1923, huile sur toile, 80x65 com / Stäfel Museum, Francfort

Max Beckmann, Les argonautes, triptyque (panneau central), 1949-1950, huile sur toile, 205x122cm, National Gallery of Art, Washington

Beckmann a pris part à la Première Guerre mondiale, a connu l'occupation hitlérienne et l’effondrement de l’Europe et a subi l'exil puis l’émigration aux Etats-Unis à l’époque de la guerre froide. Son œuvre rend compte de chacun de ces drames, sans pour autant les "illustrer" ou en faire une sorte de reportage. Tout en refusant l’anecdote ou le récit, il a montré la crise sociale et morale de l’Allemagne des années vingt et dénoncé la monstruosité du nazisme. Beckmann fait partie d’une génération brisée par une suite d'expériences traumatisantes : des tranchées à la défaite, dont on connaît la suite. Et comme Otto Dix, il répond bon gré mal gré à l’étiquette de l’Expressionnisme si l’on évoque par là la violence des formes et des figures. Mais comme nombre de grands peintres, Beckmann a expérimenté sa vie durant, ne se laissant capter par aucun mouvement. Il nous laisse une peinture personnelle et indépendante, réaliste mais chargée de symbole, un témoignage vigoureux de la société de son temps.

Sous le commissariat de Tomàs Llorens, l'exposition réunit 52 œuvres - principalement des peintures mais aussi quelques sculptures et lithographies - provenant de musées et collections du monde entier, y compris des chefs-d'œuvres, comme Les argonautes.

On a adoré la rencontre ave ce peintre !

Beckmann. Figuras del exilio

Beckmann. Figures de l'exil

jusqu'au 27 janvier / Musée Thyssen-Bornemisza, Madrid

du 21 février au 26 mai / CaixaForum, Barcelone

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